L’idée ridicule de ne plus jamais te revoir de Rosa Montero
Qu'est ce qu’un corps vivant ?
Rosa Montero rédige une biographie abrégée de Marie Curie, morte à 66 ans d’avoir subi une trop grande exposition aux éléments radioactifs. Son mari, Pierre, mort à 46 ans d’un accident, et leur fille Irène, morte à 58 ans, souffriront des mêmes maux que Marie, ravagés par le radium. En revanche Eve Curie, la sœur d’Irène, a choisi d’être pianiste et mourra à 102 ans.
Marie Curie, la chercheuse acharnée que l’on connaît, était aussi une grande amoureuse, une mère attentive, et une féministe sans concession.
Au côté de Marie Curie, veuve à 39 ans, Rosa Montero trace un parallèle et hurle sa peine entre chaque ligne : son mari, Pablo, vient de mourir, foudroyé d’un cancer. Dans des petites phrases, elle se pose mille questions sur « ce fichu corps qui devient tout à coup boiteux » et le lecteur se regarde dans ce miroir, à tous les coins de mots.
Empreint de tristesse existentielle mais bien écrit, ce livre ne fait pas rire, ni sourire et il faut s’accrocher.
Pourtant j’ai appris quelque chose sur l’addiction aux tatouages :
« On éprouve une sensation merveilleuse, un soulagement et une plénitude irrationnelles, comme si, avec ce gribouillis d’encre sous la peau, nous avions réussi à vaincre pour une fois le grand ennemi, à humilier ce corps tyrannique qui nous humilie, un corps que nous n’avions pas choisi et dont nous devons nous charger toute notre vie… ce corps qui finit par nous tuer. »
Je comprends enfin les personnes qui vont chez le tatoueur avec tant d’enthousiasme.
Singulier.